Galerie Pentcheff, acte 3

 

D’abord située à la rue Saint Jacques puis, pendant quinze ans, à la rue Paradis, la galerie Pentcheff s’est progressivement ouverte à l’art moderne et contemporain, sans cesser de promouvoir les maîtres de l’école provençale qui ont constitué son fonds initial. C’est ainsi que l’on a pu voir, en 2022, une exposition monographique consacrée à André Masson- lequel n’avait plus été exposé à Marseille depuis plusieurs décennies. En cet automne 2023, une nouvelle aventure commence pour elle avec sa relocalisation à Malmousque, dans un bâtiment historique dûment rénové pendant deux ans : le Pavillon de la Reine Jeanne. Aussi circulaire que le précédent local était longitudinal, cet espace de 200 m2 est en soi une invitation à la peinture, avec sa vision panoramique de l’anse de Malmousque, ses digues assaillies par les vagues et la chaîne de l’Estérel en arrière-fond. Il reflète on ne peut mieux l’amour de la Méditerranée que Giulia et Alexis Pentcheff s’attachent à valoriser à travers leurs expositions.

Inaugurée le 3 octobre dernier, celle-ci ne s’écarte pas de leur credo, avec une sélection de trente œuvres particulièrement soignée. D’emblée on est saisie par la beauté des deux grands tapisseries marines de Laurence Aegerter (née en 1972) qui occultent presque la délicatesse des huiles d’Alfred Lombard et l’unique aquarelle de Raoul Dufy. Une autre découverte est sans nul doute Deux femmes dans le jardin de Cagnes (1918), un admirable petit tableau qu’Auguste Renoir peignit au soir de sa vie. D’autres surprises attendent le visiteur dans ces salles en forme d’alcôve ; des huiles signées par des peintres aussi prestigieux que Pierre Bonnard, Albert Manguin, Henri Martin, Albert Marquet ou Henri Lebasque et qui nous parlent toutes de la douceur méditerranéenne. A quoi Bernard Buffet et sa grandiose Vue de Naples et du Vésuve (1991) apportent un démenti inquiétant. Tandis qu’un bronze de César, Le centaure, rappelle que le sculpteur marseillais le plus célèbre au monde savait faire bien autre chose que des compressions. Les dernières œuvres présentées ici nous entraînent encore plus haut dans le temps, notamment cette vue du port de Marseille et de ses joutes nautiques composée par Charles Eschard en 1791.

Si l’on ajoute à cet espace deux dépendances de 50 m2 chacune pour des résidences d’artiste, le Pavillon de la Reine Jeanne est appelé à devenir l’une des galeries les plus typiques de la Marseille contemporaine. Mais il n’est pas certain que les invités du prochain vernissage viendront ici par la mer, comme ce fut le cas lors de la soirée inaugurale.

(Jusqu’au 15 novembre. Pavillon de la Reine Jeanne, 10 Chemin du génie,13007 Marseille. Tel : O4 91 42 81 33)

(Article publié dans la revue Phoenix n° 40)


Jacques Lucchesi


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