Présence de Louis Toncini


      
           











Parmi les différents artistes que l’émigration italienne a apportés à Marseille au XXeme siècle, une place particulière doit être faite à Louis Toncini (1907-2002). Rapidement, il devait manifester ses dons pour la sculpture, le dessin et la peinture, tout en se forgeant une conscience politique en rapport avec son milieu social. Sous l’angle artistique, elle se traduira par la création, en 1931, du groupe des peintres prolétariens, avec Antoine Serra, François Diana et Léon Cadenel. Il s’agissait pour eux de faire entrer dans le champ de l’art le monde ouvrier, son décor, ses acteurs et leurs luttes émancipatrices, sujets qui n’étaient pas exactement ceux de l’école marseillaise mais que les évènements politiques d’alors justifiaient pleinement. Du reste, il ne faudrait pas réduire l’inspiration de Louis Toncini à cette seule thématique ; car au cours de sa longue vie créatrice, il aborda avec bonheur tous les genres picturaux, d’ailleurs toujours ancrés dans la réalité marseillaise.

C’est ce que montre la présente exposition, dans les locaux de la mairie des 1er et 7eme arrondissements de Marseille, avec plusieurs dizaines de tableaux issus du fonds familial et de collections privées. A quelques rares exceptions près – comme cet Autoportrait à 18 ans peint en 1925 -, ils ont été réalisés tardivement, durant les années soixante et soixante-dix. Mais s’ils reflètent certainement la maturité du peintre, ils mettent aussi en évidence la persistance de ses engouements de jeunesse, comme cette superbe Grue jaune (1978) ou ce Chalutier violet à quai (1979). Sa palette où dominent les couleurs chaudes, son goût pour les empâtements et les formes en aplat se retrouvent également dans ses natures mortes, ses scènes de genre et ses paysages, voire ses intérieurs d’atelier. Ailleurs, il tend vers une semi-abstraction, comme dans Le fort Saint-Nicolas vu du bassin de carénage (1948) ou Vers les Goudes (1962). Et l’on méditera sur  son étonnante dextérité dans une vidéo qui le montre, à près de 90 ans, en train d’exécuter le portrait de Doucette Stamboulian.
Cette exposition monographique – la première depuis longtemps à Marseille –fera certainement le bonheur de toutes celles et ceux  qui apprécient l’art de Louis Toncini. Elle est corrélée à un autre évènement culturel : la parution, aux éditions Hervé Chopin, du beau livre que Claude Darras, écrivain et critique d’art, a consacré au peintre italo-marseillais. Fruit d’un long travail de recherches et d’échanges, cet ouvrage impeccablement rédigé fourmille d’informations sur Toncini et son époque. Avec ses 288 pages et ses très nombreuses reproductions picturales, il fait plus que combler une lacune exégétique, référence désormais incontournable pour qui veut découvrir ce phare de la peinture marseillaise.        


Du 10 au 26 juillet 2019, 61 la Canebière, 13001, Marseille
Louis Toncini , le maître de Rive-neuve, par Claude Darras, éditions Hervé Chopin, 288 pages, 45 euros                                               
                          
  Jacques LUCCHESI

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